Dans la 2eDB, en Afrique du Nord

Ce sont les lettres, nombreuses, qu’il a écrites de Temara, près de Rabat puis sur un coteau, au dessus d’un vignoble, près d’Oran, en attendant son embarquement.

Le 23 février, première lettre de la 2eDB. Il a passé une nuit éprouvante, à la belle étoile sur un plateau de pick-up, mais sous la pluie et le vent. Il n’est pas encore installé, mais est ravi de ses fonctions et de l’ambiance.

Où l’on apprend le 29 février que la pluie dure, que le vent a emporté la cuisine cette nuit, et que Georges cherche à nourrir ses 200 bonshommes, quitte à aller chercher des potes à Safi !

Le 3 mars, Georges fait le compte de ce qu’il a pu grappiller pour nourrir (et abreuver) ses hommes. Il cherche aussi de la crème et un thermomètre médical pour Yvonne. La débrouillardise, toujours.

Le 5 mars il annonce fièrement qu’il vient d’être nommé capitaine, ce qui élargit le cadre de ses fonctions, mais aussi le montant de sa solde. C’est l’occasion d’un discours sur les différences des soldes liées aux charges de famille entre les différents corps. Il semble manquer un feuillet à ce courrier qui finit abruptement..

Le 6 mars, il revient sur le choix qu’il a fait de partir vers la 2eDB plutôt que de rester tranquille au Maroc, mais ne le regrette pas. Etre un Homme est sans doute important dans sa relation avec Yvonne.

Le 9 mars, il décrit un peu le désordre qui règne dans son unité (habillement, comptabilité) et les liens qui sont lent à se former entre les gens venus des FFL et les marocains comme lui.

Le 13 mars il revient de Safi, où il a passé le week-end. Le retour a été difficile, sa jeep étant tombée en panne. C’est aussi l’occasion d’évoquer des soucis avec la direction de l’enseignement, qui n’a semble-t-il pas appréciée qu’il rejoigne les rangs des forces françaises libres.

Le 14 mars il annonce à Yvonne qu’il a réglé les problèmes administratifs et qu’elle pour rester dans le logement de fonction qu’elle occupe pour la durée de la guerre. Il s’inquiète de ses grandes filles adolescentes, qu’il faut « surveiller »guider et conseiller ».

Le 15 mars, Georges parle de son travail, lourd mais qui lui convient, cela lui faisant passer le temps plus rapidement. Il annonce avoir écrit à son ami américain Clifford pour lui annoncer la future naissance de Jean-François et lui demander d’en être le parrain.

Le 17 mars, une courte lettre pour annoncer l’envoi d’un caisse par la CTM (compagnie de bus marocaine), mais surtout qu’il dîne ce soir avec le général (ma chère!)

Le 18 mars, on apprend beaucoup de chose : on connait le contenu de la caisse qu’il a fait envoyer à Safi (pour vérifier qu’on n’a rien volé), et il donne le menu du repas fait avec le Général Leclerc. Il en fait également un portrait intéressant. On apprend aussi qu’Yvonne est folle de tableaux…

Le 20 mars, dans cette lettre, il donne des nouvelles de jeunes ardéchois rencontrés à Rabat, et quelques nouvelles fraîches de Privas par la même occasion. Cette lettre est aussi l’occasion de regretter la perte des lettres d’Yvonne, puisqu’il parle de l’esprit dans lequel ils correspondent tous les deux, se raconter leur quotidiens pour avoir l’impression d’être ensemble.

Le 21 mars, Georges annonce que son colonel part en permission à Alger, et qu’il sera le « grand patron » pendant quelques jours. On pourrait croire qu’il va se plaindre du surcroit de travail que cela occasionnera, non, « il sera plus libre » et viendra le week-end à Safi. Il parle aussi d’excursions qu’il organise pour ses hommes qui ont tendance à boire par ennui et à « faire des bêtises ».

Le 23 mars, où il parle de la lettre de Lulu, et tente de calmer Yvonne, fâchée par des remarques de collègues ou de voisines. Il planifie son excursion du dimanche à Ifrane, avec une soixantaine de soldats.

Le 27 mars il raconte sa visite à Ifrane, l’accueil de leurs connaissances communes, dont une qui lui a fait de la peine, tension entre vichystes et gaullistes, ou peut-être malentendu, mais également ce qu’il est advenu des différents hôtels et centres de vacances. Ses hommes ont pu skier, et ont eu droit à un méchoui.

Le 29 mars, Georges philosophe, parle de la guerre, de la vie, de ce qu’il aime vraiment. Et il soutient Yvonne, qui a puni sa fille Lulu.

Où l’on apprend, le 1er avril, que c’est au catéchisme que Lulu a fait des bêtises, mais également qu’il ne pourra pas venir à Safi le samedi, qu’il essaiera d’avoir une permission au retour de son capitaine, et que son unité quitte le bord de la mer pour camper dans une forêt, sur la route de meknès.

Le 5 avril, il parle de ses qualités de commandement, en toute modestie, de son plaisir des responsabilités, mais son cafard transparait à travers un courrier bien sérieux.

Le 7 avril, Georges écrit une lettre qui ne passera pas par la censure. Il annonce le départ de la 2eDB dans les jours qui viennent, départ de Casablanca, en disant à Yvonne de n’en parler ni à ses filles, ni à ses amies. C’est inhabituel chez lui.

Le 8 avril, une lettre qui nuance la précédente. Par ailleurs, De Gaulle a passé en revue les troupe, et Georges exprime son sentiment de fierté, dans son uniforme américain et son casque de guerrier.

Le 10 avril il annonce son départ, non pour l’Angleterre, mais par la route, pour rejoindre Oarn, par où il est déjà passé en septembre 39.

Le 13 avril son escadron est sur la route de l’Algérie, en passant par Rabat et Meknes. Il raconte le voyage, les conditions, la foule en traversant les villes. Tout cela est à demi-mot à cause de la censure.

Le 15 avril, ils sont arrivés à côté d’Oran, les conditions sont plus ou moins facile, il pense ne pas rester longtemps ici. Je vois le mot roule-doux, mots que je n’avais pas entendu depuis mon enfance, une marque de volet roulant je crois.

Le 16 avril c’est le statu quo, en attente d’embarquement, échange avec les officiers de marine voisins. La 2eDB a commencé à embarquer, peut-être bientôt son tour.

Le 18, il écrit que sa vie est mouvementée mais qu’il ne peut rien dire, faite des références à 1940, s’inquiète de la santé de sa famille. Il campe sous la pluie.

Le 19 avril, toujours rien de nouveau, il parle uniforme et également de la voiture qu’il a eu en dotation, un scout car, gros véhicule blindé et armé de commandement.

Le 20 avril, Georges écrit encore une fois une dernière lettre, une lettre annonçant son départ imminant. Il évoque également la rougeole de sa fille.

Le 22 avril, une lettre – censurée – qui annonce leur départ, mais ils sont coupés du monde, attendent sans doute des conditions météorologiques meilleures pour embarquer. Ils sont sales, fatigués, amorphes.

Le 23 avril, c’est enfin le départ, avec des précaution pour éviter la censure, traverser la rivière, embarquer les élèves et leurs trottinettes… Et Georges fait un autoportrait de lui amusant. Il s’inquiète des résultats scolaires de Paulette.

Le 25 avril, l’attente s’éternise, et Georges, égal à lui même, organise une excursion à la plage avec deux lieutenants et une partie de ses soldats.

Le 26, toujours en attente, encore une lettre censurée, on se demande bien pourquoi, il parle d’un repas avec des officiers américains et de la situation de certains de ses collègues, dont un qui n’a pas vu sa femme et ses quatre enfants depuis juin 40.

Le 28 avril, une lettre assez peu compréhensible à cause de la censure. On y apprend quand même que les effectifs diminuent, et qu’il ne devrait pas partir dans les derniers. Il fait allusion à une connaissance, le fils de Mme Ruelle.

Le 30 avril une lettre rageuse sur du papier à lettre « moche » avec un stylo qui ne marche pas. Des informations, mais comprenne qui pourra, la saison des asperges, il en est question dans plusieurs lettres. Sans doute un code prédéfini entre eux.

Le 1er mai, encore une lettre facile à lire bien que censurée, où il raconte l’histoire d’un capitaine qui se cache dans les fourrés pour se soulager, alors qu’un caporal est à la chasse aux lapins ou autre gibier. Le capitaine est donc à l’hôpital d’Oran.

Le 12 mai, l’attente se fait pesante, les journées à la plage ne permettent que de passer le temps. Georges revient sur le bébé à venir, propose des prénoms pour une fille, pour un garçon, mais accepte le Jean-François, avec un trait d’union, choisi par Yvonne.

Le 13 mai, Georges est inoccupé, impatient de partir. On apprend que la traversée pour l’Angleterre durera 13 jours. Sa seule occupation c’est la plage, à 12km du camp, et les saôuleries pour les soldats. Ils ont entendu une cantonade au loin sans plus d’information.

Le 14 mai, toujours l’attente, ronchon mais résigné, c’est militaire… Ce sera sa dernière lettre d’Afrique du Nord, il a dû partir dans les jours qui ont suivi.

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